En ces temps de confinement exceptionnel, où pour la majorité nous sommes appelés à rester chez nous, les distances semblent infranchissables. Parce que demain s’invente aujourd’hui : artistes et architectes imaginent, célèbrent et bâtissent notre patrimoine du futur.
La Société du Grand Paris invite à une traversée futuriste, cosmique et lumineuse, onirique et cinétique au coeur des territoires du Grand Paris, à travers les prochaines gares du Grand Paris Express.
Arrêt Villejuif-Institut Gustave Roussy — Métro lignes 14, 15
Un cadran astronomique
Creusée à 48 mètres sous terre, la gare Villejuif Institut Gustave-Roussy est l’une des plus profondes du Grand Paris. Une particularité qui n’a évidemment pas échappé à son architecte Dominique Perrault qui s’est employé à concevoir un connecteur du monde du dessous au monde du dessus.
Lorsqu’on sortira du métro, on sera en contact direct avec l’air ambiant et la lumière ambiante donc on n’aura aucun sentiment d’etre à 50 mètres de profondeur.
Dominique Perrault
Dominique Perrault a conçu cette gare comme un cylindre évidé qui pourrait laisser passer l’air et la lumière. Aucun bâtiment ne la surmonte et elle est pour ainsi dire de plein air, fermement ancrée dans l’espace public. Ouverte sur la ville et l’hôpital non loin, elle l’est aussi sur le parc adjacent et dans un même mouvement circulaire elle lie l’urbain et l’arboré dans le même paysage. Lieu emblématique de la transformation de Villejuif, cette architecture de « qualité architectonique » a quelque chose d’une sculpture minimale, d’un monument au passant ; elle offre depuis le métro une vue directe sur le ciel.
Exodo, pour que la lumière ne s’éteigne jamais
Plus qu’une gare ou qu’une architecture, c’est autour de cette idée de passage que l’artiste Iván Navarro a conçu son projet empreint d’astronomie. Exodo reprend la forme de deux cadrans solaires posées l’un sur l’autre et joue avec l’idée de lumière chère à Dominique Perrault.
L’aspect magique de ce projet, c’est l’union entre la lumière naturelle et artificielle.
Iván Navarro & Dominique Perrault, lors d’un entretien croisé
L’œuvre prend pour ainsi dire le relais de la lumière naturelle et vient par un jeu de miroir et de néons apporter son éclairage là où l’architecture a posé des planchers et des plafonds, des niveaux pour passer d’une ligne à l’autre. C’est un ciel étoilé en plein souterrain composé de néons et de miroirs qui donnent l’illusion d’une profondeur infinie. Les 118 caissons lumineux, chacun tamponné du nom d’un astre, rythment la course du jour et de la nuit sans jamais s’éteindre. L’œuvre dresse ainsi un pont entre deux réalités, celles du dessous et du dessus, celles du souterrain et du ciel, du jour et de la nuit.
Un chantier dévoilé au public lors du KM8, en février dernier
Ouvert au public, lors du KM8 du 1er février dernier, le chantier de la future gare Villejuif Institut Gustave Roussy a déjà accueilli plus de 6000 visiteurs. À côté de l’œuvre Tuning d’Iván Navarro présentée pour l’occasion, une mise en lumière artistique du puits parvenait à donner le vertige ! Les chiffres que résumaient les cabanes de chantiers révélaient l’ampleur des travaux et la prouesse technique sans précédent qui avait déjà eu lieu.
Timelaps du chantier
Il faut imaginer d’abord le temps qu’il a fallu pour creuser le puits de 50 mètres de profondeur, le consolider avec une structure en béton armé, ensuite la difficulté de faire se croiser les tuneliers. Le tunellier Allison de la ligne 14 sud traverse en premier le puits de la gare Villejuif IGR pour laisser place au tunnelier Amandine de la ligne 15 sud qui continue son cheminement vers Villejuif Louis-Aragon.
Un véritable ballet de « grosses mécaniques ».
Les tandems artistes & architectes du Grand Paris Express
Pour chacune des gares, la Société du Grand Paris a souhaité faire appel à un artiste, pour concevoir une oeuvre d’art pérenne, dans le cadre d’un processus d’implication originale. L’intervention artistique est le fruit de la rencontre entre deux univers esthétiques : l’architecte et l’artiste oeuvrent en «tandems». Cette étroite collaboration se concrétise tout au long des différentes études de conception de la gare, permettant la création d’oeuvres véritablement intégrées. La conception de ces oeuvres d’art doit permettre d’assurer la qualité des espaces gares et de l’expérience voyageurs à long terme : la maintenance et la pérennité des oeuvres sont prises en compte dès leur conception.
Chaque jour, plus de 2 millions d’usagers seront au contact de cette collection d’art public, d’architecture et d’innovation urbaine à l’échelle du Grand Paris. Celle-ci participera au rayonnement national et international de la région Île-de-France, et constituera une nouvelle offre culturelle et touristique accessible à tous, faisant de chacune des 68 gares du Grand Paris Express un lieu de vie et une destination à part entière.
Ce programme est conduit sous la direction artistique de José-Manuel Gonçalvès accompagné de commissaires invités : Alexia Fabre, conservatrice en chef du MAC VAL, Laurent Le Bon, directeur du Musée Picasso, Fabrice Bousteau, rédacteur en chef de Beaux Arts Magazine, Annabelle Ténèze, directrice des Abattoirs-FRAC Midi-Pyrénées et Charlotte Laubard, directrice du Département des Arts Visuels de la HEAD.
Qui est Dominique Perrault ?
Depuis trente ans et à travers des réalisations majeures comme la Bibliothèque Nationale de France (BNF) à Paris ou l’Université souterraine EWHA à Séoul en Corée, l’architecte Dominique Perrault montre son intérêt pour l’architecture souterraine qu’il appelle le « Groundscape ». Membre depuis 2012 du Conseil Scientifique de l’Atelier International du Grand Paris, il travaille sur la question de la résilience et de l’adaptation des grandes métropoles aux changements climatiques. Il reçoit en 2015 le prix Praemium Imperiale dans la catégorie architecture.
Qui est Iván Navarro ?
Né en 1972 à Santiago, Iván Navarro a grandi sous la dictature de Pinochet. Il vit et travaille à New York depuis 1997. L’artiste utilise la lumière comme matériau de base, détournant des objets en sculptures électriques et transformant l’espace par des jeux d’optique. Au-delà de son aspect ludique, son œuvre est hantée par les questions de pouvoir, de contrôle et d’emprisonnement. Toujours présent en filigrane, le détournement de l’esthétique minimaliste devient le prétexte d’une subtile critique politique et sociale. Iván Navarro est représenté à Paris par la Galerie Templon.